L'histoire du tatouage : Les plus célèbres Tatouées

histoire du tatouage

L’histoire du tatouage et de ses porteurs en Europe a été largement oubliée pendant la période de christianisation, mais a refait surface lors des grandes explorations maritimes occidentales. Depuis, le tatouage n’a cessé de fasciner les foules curieuses, donnant lieu à de nombreux spectacles.

Malheureusement, de nombreux “indigènes”, contraints à bord des navires, ont connu des destins tragiques. Certains ont été exploités, d’autres, au contraire, traités avec respect. Ces pratiques, souvent justifiées par une pseudo-science, ont ouvert la voie à un nouveau phénomène : l’exhibition marchande d’étrangers tatoués.

Dans cet article, nous explorerons certains des tatouées les plus célèbres de cette époque fascinante de l’histoire européenne.

 

ARNAQ, LA FEMME ESKIMO

Les premières traces écrites d’autochtones dans l’histoire du tatouage remontent à 1576, lorsque Sir Martin Frobisher, un marin anglais, captura trois Inuits lors d’une expédition en Antarctique. Parmi eux se trouvaient un enfant, un homme et une femme.

La femme inuit avait le visage orné de tatouages sur le front et le menton. Elle fut exposée avec un grand succès à la cour de Londres ainsi que dans les pubs locaux. Malheureusement, après un mois en Europe, les trois Inuits déracinés succombèrent. Leurs organismes n’étaient pas immunisés contre les virus européens, ce qui entraîna leur décès.

 

Arnaq- Tatouages sur le front et menton- Portrait de John White- Encre et aquarelle – British Museum

GIOLO DES PHILIPPINES

En 1691, l’explorateur William Damper fit sensation en Angleterre avec Giolo, son domestique originaire des Philippines, ramené d’un long voyage. Giolo, un homme tatoué, fut exhibé contre de fortes sommes d’argent auprès de la noblesse et du peuple anglais.

Cependant, la petite variole emporta Giolo au bout de quelques mois, malgré les espoirs de richesse de son maître. Un lambeau de sa peau tatouée fut conservé dans le cabinet de curiosités du Collège Saint John à Oxford jusqu’au 19ème siècle, devenant ainsi la première relique de peau tatouée en Angleterre. Cette époque marque le début de l’exploitation des tribus par les colons, qui considéraient les natifs comme des marchandises lucratives.

L'histoire du tatouage

Gravure représentant le Prince Giolo et ses tatouages typiques des Philippines

C’est ainsi que cette époque marqua le début de l’exploitation des tribus par les colons. Ces derniers considéraient les natifs comme étant une marchandise, une curiosité pouvant leur apporter des revenus considérables.
Ils condamnaient ces hommes et femmes à une mort certaine loin de chez eux. En effet, ces peuples lointains n’étaient pas immunisés contre les maladies occidentales.

Les tatoués étaient souvent présentés dans des expositions coloniales, agissant comme des attractions de type “zoos humains”, attirant les foules dans toutes les cours royales européennes. Les tatouages les plus célèbres, souvent issus des mers du Sud, fascinaient le public par leur exotisme et leur aspect spectaculaire. Cependant, certains nouveaux explorateurs ont adopté une approche plus humaine envers les populations locales, jouant ainsi un rôle important dans l’histoire et l’évolution du tatouage. Cette évolution reflète les changements dans les perceptions sociales et culturelles liées aux tatouages ethniques.

 

AOTOUROU LE TAHITIEN

Lors d’une exploration, le chef tahitien Eriti confia un jeune homme, Aotourou, au capitaine Louis-Antoine de Bougainville. Bougainville et son équipage s’attachèrent à Aotourou et le ramenèrent en France, faisant de lui le premier Océanien à fouler le sol français. Présenté au roi Louis XV et à la société instruite de l’époque, Aotourou suscita un vif intérêt en raison de ses tatouages et de ses origines lointaines.

Bougainville, soucieux de ne pas faire de Aotourou une simple curiosité, entreprit de lui offrir une éducation adaptée. Grâce à cette attention, Aotourou s’intégra parfaitement à la vie parisienne pendant onze mois. Cependant, son mal du pays poussa Bougainville à organiser son retour à Tahiti. À cet effet, il affréta un navire à ses propres frais et finança une nouvelle expédition pour ramener Aotourou chez lui.

De retour à Tahiti, Aotourou retrouva sa communauté. Certains chercheurs suggèrent qu’il aurait eu du mal à décrire son expérience en France, faute de vocabulaire dans sa langue. Malheureusement, aucune peinture ne le représente, mais des écrits témoignent de son histoire et de son voyage en France. Cette histoire illustre les premiers contacts entre les cultures océaniennes et européennes, ainsi que l’impact de ces rencontres sur les individus impliqués.

 
 

OMAÏ LE TAHITIEN

Omaï, un sage de la monarchie tahitienne, occupe une place importante dans l’histoire du tatouage. Il devint le premier Polynésien à fouler le sol de l’Angleterre lorsqu’il embarqua librement en 1773 sur un navire de la deuxième expédition de James Cook. Le célèbre capitaine Cook a contribué à populariser le tatouage parmi les marins de son époque.

À son arrivée en Angleterre, les spectaculaires tatouages d’Omaï firent sensation dans les salons londoniens. Présenté au roi George III, il fut traité avec respect et étudié par les anthropologues de l’époque lors de ses trois années passées à la cour. Sa célébrité fut telle qu’une pièce de théâtre lui fut dédiée. Omaï put ensuite retourner librement dans son île d’origine, où il décéda en 1779.

L'histoire du tatouage

Portrait du Prince Omai-Peinture à l’huile- Sir Joshua Reynolds. L’histoire du tatouage

Cette époque a marqué une transition dans l’histoire du tatouage, passant des “indigènes” rapportés comme des trophées lors des expéditions maritimes aux marins occidentaux revenant des terres lointaines couverts de tatouages ethniques, perçus comme des “sauvages”. Cette évolution a connu un succès retentissant et a contribué à l’expansion de la pratique du tatouage ethnique à travers le monde.

JEAN-BAPTISTE CABRI

Ce marin français, ayant déserté et épousé une marquisienne, s’intégra parfaitement à sa tribu, adoptant progressivement les tatouages traditionnels. En 1804, découvert par un explorateur russe, Cabri devint le premier occidental tatoué à se produire sur scène.

Il donna des représentations à Moscou et à Saint-Pétersbourg, relatant avec force détails son histoire, y compris des récits fantaisistes sur son passé, comme des prétendus actes de cannibalisme et son mariage avec une princesse, ainsi que ses nombreuses séances de tatouage.

Ces récits fantaisistes lui permirent d’attirer les foules et de se justifier de sa désertion. Malgré son succès initial, Cabri disparut rapidement de la scène artistique européenne et décéda dans un hôpital du Nord de la France. Craignant la profanation de sa sépulture en raison de l’intérêt suscité par sa peau tatouée, il demanda à être enterré dans une fosse commune.

 

 

Jean-Baptiste Cabri- Gravure- Circa 1700. L’histoire du tatouage

Bien que très bref, le grand succès qu’il connut ouvrit la brèche à la tendance des attractions humaines payantes.

JOHN RUTTERFORD “THE WHITE CHIEF”

En 1826, lors de son arrivée en Nouvelle-Zélande, le capitaine américain Jackson fut accueilli par des Maoris, parmi lesquels se trouvait un homme inhabituellement blanc, nommé John Rutterford. Rutterford raconta au capitaine Jackson son histoire : capturé par les Maoris, réduit à l’esclavage et soumis au tatouage traditionnel Moko pendant dix années.

Le capitaine Jackson le ramena en Amérique, où Rutterford regagna ensuite l’Angleterre. Là-bas, il devint célèbre grâce à des spectacles détaillant ses supposées aventures, ce qui lui valut une grande richesse. Cependant, il est maintenant évident que ses récits étaient fictifs : il n’avait pas été tatoué de force ni réduit à la captivité. Ses tatouages, bien que de style Maori, étaient en réalité typiques des tatouages polynésiens.

 

John Rutherford- Dessin original 1828 – L’histoire du tatouage

 

Il apparaît que Rutterford et ses semblables se sont fait tatouer librement lors de leurs voyages. Les récits sensationnels de cannibalisme et d’esclavage servaient à ajouter du piquant à leurs spectacles. Ces légendes sont devenues le thème central des spectacles de tatouages, devenant une véritable industrie à partir de 1830, notamment grâce à Phineas T.Barnum et ses célèbres cirques et freakshows.