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Alexendre Lacassagne et le tatouage chez les bagnards français

tatouage chez les bagnards français

Parmi les nombreuses découvertes maritimes, le tatouage est apparu comme un nouveau trésor. Rapidement associé aux marins qui décrivaient leurs voyages à travers leur peau, le monde criminel en a rapidement pris possession. Utilisé pour affirmer leur identité, il n’a pas fallu longtemps pour que la « bousille » soit associée au crime. De la mer jusqu’aux bagnards français, le tatouage a vite été lié aux mauvais garçons.

IMMORTALISER LA VIE

Une date, un prénom, un bateau, une femme, une étoile… Immortalisés à travers leur peau, les bagnards exprimaient des idéologies et des sentiments qu’ils n’auraient pas pu partager autrement. C’est ainsi qu’à travers les âges, un véritable alphabet s’est créé.

Loin des studios que l’on connaît aujourd’hui, les premiers tatouages étaient souvent réalisés dans les arrière-salles des bistrots de quartier entre deux verres. Un ami, un compagnon, une simple connaissance, le premier venu s’improvisait tatoueur. La découverte du tatouage se faisait dès le plus jeune âge. Moussaillon, prisonnier dans des maisons de correction ou simple apprenti, on souhaitait inscrire ce passage de vie sur son avant-bras droit. C’est ainsi le début d’une longue histoire retranscrite à travers l’encre sous la peau.

LES BAGNARDS, DES LIVRES OUVERTS

La symbolique de chaque tatouage était tellement forte qu’ils sont devenus une véritable question médico-légale. C’est en 1876 que Cesare Lombroso (1835-1909) publia « L’Uomo Delinquente ». Pour lui, il était possible de définir et de repérer les criminels à l’aide de méthodes scientifiques. Des caractéristiques fortes comme le tatouage étaient un symbole de criminalité. En France, c’est Alexandre Lacassagne (1843-1924), professeur de médecine lyonnais, qui s’est appuyé sur l’œuvre de Cesare avec son livre de référence « Les tatouages, étude anthropologique et médico-légale ».

Père de la criminologie moderne, il exposait comme théorie que « le tatouage était l’inaction consécutive à l’emprisonnement doublée d’une impossibilité d’exprimer autrement des idées et des sentiments particulièrement importants ». Ces hommes-carnets finissaient par être des livres ouverts.

ALEXANDRE LACASSAGNE

Lacassagne réunit donc plus de 2000 tatouages chez les bagnards français relevés sur la peau de 550 individus. Son étude a permis d’analyser le corps des prisonniers mais également ceux des soldats. Il décalquait simplement les « bousilles » directement sur la peau tout en prenant une vingtaine de notes à propos du tatoué et de son tatoueur. Le professeur Lacassagne a distingué plusieurs catégories de tatouages : emblèmes patriotiques et religieux (91), inscriptions professionnelles (98), inscriptions (111), emblèmes militaires (149), emblèmes métaphores (260), amoureux et érotiques (280), fantaisistes et historiques (344).

Un codage facile à décrire puisqu’il revenait régulièrement de la même manière sur les différents prisonniers. Du Buste de la République (bonnet phrygien ou pièces de monnaie) aux nombreux pictogrammes représentant des métiers (truelle pour le maçon, grappe de raisin pour le vigneron, hache, scie et compas pour le charpentier…), on pouvait finalement assister à de réelles autobiographies encrées en un simple coup d’œil.

ET LA SIGNIFICATION DES TATOUAGES ?

Les bagnards possédaient des milliers de tatouages différents. En revanche, il est difficile de retranscrire l’intégralité des “bousilles” existantes. Voici quelques exemples qu’on retrouvait fréquemment chez les bagnards français.

Je suis un cochon au lit

Un tatouage rébus d’une promesse prétentieuse. Souvent tatoué sur le bas-ventre, il n’était pas rare de retrouver des phrases suggestives sur les prisonniers comme “Robinet d’amour”, “au bonheur des dames”. De plus, les tatoués exprimaient une idée de machisme.

Étoile à 5 branches


La signification dépendait du côté où elle était tatouée. Pour l’épaule droite, elle signifiait le bonheur. Pour l’épaule gauche, le malheur ou la mauvaise étoile.

La moustache tatouée

Surnommés les têtes de veau avec leur fausse moustache, ils étaient cependant tatoués pour lutter contre l’interdiction de porter la moustache chez certains prisonniers.

Le Papillon


Symbole emblématique des voleurs, il était parfois accompagné de la phrase “comme lui, je vole”.

Un cœur traversé par un poignard


Souvent accompagné de 3 ou 5 gouttes de sang, il symbolisait la souffrance sentimentale.

Mauvais Garçons

Pour en découvrir davantage sur le style tatouage chez les bagnards français, nous vous recommandons le livre Mauvais Garçons de Jérôme Pierrat et Eric Guillon publié chez la Manufacture de livres.

De plus, notre résident Takumi réalise des projets dans le style bagnard. Il serait honoré et ravi de discuter d’un projet autour de ce thème avec vous. Pour cela, vous pouvez nous contacter par e-mail ou passer à la boutique du mardi au samedi, de 12h à 20h.

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