Évoquer les femmes tatouées ayant marqué l’histoire sans mentionner les pionnières du tattoo serait impensable. Maud Wagner, Lenora Platt, Djita Salomé, trois figures qui ont laissé une empreinte indélébile à travers les âges. Bien que souvent méconnues du grand public, elles méritent d’être célébrées en tant qu’avant-gardistes. Explorez le destin unique de ces trois femmes tatouées.

Femmes tatoués

MAUD WAGNER

Originaire de Lyon County, au Kansas, Maud Wagner n’était pas directement liée au monde du tatouage au début de sa carrière. Contorsionniste dans un cirque, sa vie bascule lorsqu’elle rencontre Gus Wagner, “The Tattooed Globetrotter”, à l’Exposition Universelle de 1904. Sous son mentorat, elle devient tatoueuse, adoptant le style Handpoke, une technique qu’elle continue à utiliser malgré l’émergence des machines électriques. Elle devient une icône, inspirant de nombreuses femmes tatouées et jouant un rôle dans la démocratisation du tatouage.

Tombé sous le charme de Maud, il lui propose logiquement de le suivre dans son aventure de tatoueur itinérant. La contorsionniste accepta son offre avec pour seule condition, qu’il lui apprenne à tatouer. Ni une ni deux, Gus n’hésita pas une seconde. En plus de lui apprendre le métier, ses secrets, de partager son talent et sa passion, Maud devient vite sa muse et son corps s’emplit de tatouages. Étant douée naturellement, il fallu peu de temps pour la tatoueuse, à son tour, de se faire un nom.

LE HANDPOKE, SA MARQUE DE FABRIQUE

Malgré la modernisation du tatouage, Maud reste une anomalie dans ce milieu. En plus d’être une femme, elle tatoua durant l’entièreté de sa carrière en Handpoke, et ce, malgré l’apparition des machines électriques. Il en va de même pour son mari ainsi que sa fille, Lotteva, reprenant rapidement la relève des parents. Après un mariage en 1907, Gus et Maud menèrent une vie de nomades. Traversant l’Amérique, les mariés se produisent en tant que tatoué et tatoueur avec les artistes de cirque pour principale clientèle, ce qui permit au tatouage de se démocratiser en dehors des ports.

Emblématique, Maud inspira un nombre incalculable de femmes tatoués. Son importance était telle qu’elle faisait partie du groupe “The American society for keeping woman in her proper sphere”, un groupe de femme lutant pour l’évolution de celles-ci dans la société. Elle décéda en 1961 à Lowton, dans l’Oklahoma.

LENORA PLATT

Lenora Platt Blair, auto-didacte, commence sa carrière de tatoueuse dans les cirques à l’âge de 29 ans. Elle se distingue notamment pendant la Première Guerre mondiale en tatouant dans le célèbre “Sheeslay Shows”. À Newport News, elle ouvre son propre salon de tatouage, devenant une figure incontournable du milieu, surtout parmi les marins. Elle œuvre pour l’inclusion des femmes dans l’industrie du tatouage, recrutant d’autres femmes tatoueuses et encourageant ses pairs à faire de même.

UNE ENCRE POUR LES MARINS

C’est dans la bourgade de Newport News que Lenora installe son salon. Le tatouage est un indispensable des marins. Nombreux en stationnement, la tatoueuse devient vite une icône du port. Aidée régulièrement par un de ses collègues du Sheelay Shows, Sir Edouard, le salon installé à Washington Avenue est loin d’être le seul. De nombreux tatoueurs du même collectif sont présents. Néanmoins, Lenora sort son épingle du jeu en étant la seule artiste femme et professionnelle dans les environs et devient une incontournable du tatouage à Norfolk.

Pour continuer dans sa lancée de femme indépendante dans un milieu dominé par les hommes, elle souhaite donner sa chance à d’autres femmes. Dans un objectif de rendre le monde du tatouage paritaire, elle cherche à recruter deux autres femmes pour travailler avec elle. Elle insiste même auprès de ses confrères pour qu’ils fassent de même. Cela poussera Edward J. Miller, un autre tatoueur de Norfolk à recruter une partenaire. Se faire tatouer par une femme devînt donc une mode ce qui, en plus de son expérience, contribua au succès de Lenora.

Après avoir connu 5 maris, Lenora, malheureuse en amour, tomba malade. Malgré cela, elle continua le tatouage jusqu’à sa retraite et décéda le 28 octobre 1960.

DJITA SALOMÉ

Surnommée “la femme aux 100 000 000 piqûres”, Djita Salomé, bien que ses origines soient floues, connaît une renommée internationale grâce à ses tatouages colorés. Elle parcourt l’Europe dans les années 1900 et 1912, exposant ses tatouages au Castan’s Panopticum en Allemagne et au Luna Park de Paris. Sa popularité la conduit à traverser le monde, participant à des foires et des carnavals à Berlin, Paris, St. Petersbourg, Londres et New York.

MILLE ET UNE COULEURS

Très célèbre en France, elle effectuait de nombreuses tournées européennes. Notamment en 1900 et 1912, on pouvait retrouver Djita en Allemagne, au Castan’s Panopticum, un musée de Cires créé par les frères Castan. En 1912, on pouvait également la contempler en France au Luna Park de Paris où elle exhibait ses tatouages.

Sa notoriété était telle qu’elle dût engager un imprésario pour organiser ses tournées internationales. Elle était l’une des rares artistes à posséder son stand d’exposition dans les foires et les carnavals. Sa popularité l’a conduite à traverser le monde, passant par Berlin, Paris, St Petersbourg, Londres et New-York.

Ces trois femmes tatouées ont joué un rôle crucial dans l’histoire du tatouage, ouvrant la voie à une nouvelle génération d’artistes. Leur héritage perdure, inspirant toujours les femmes tatouées d’aujourd’hui.